16/02/2021

La mention d'un report des congés payés sur le bulletin de paie peut-elle engager l’employeur ?

La mention d'un report des congés payés sur le bulletin de paie peut-elle engager l’employeur ?

En principe, et hors cas particulier (congé de maternité ou d’adoption, arrêt de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle notamment), en l’absence d’autorisation expresse de sa hiérarchie, le salarié ne bénéficie d’aucun droit au report de ses congés payés.

Il n’est donc pas fondé à demander une indemnité compensatrice pour des arriérés de congés non pris.

Qu’en est-il en présence d’une mention de ce report sur le bulletin de paie ?

Il a déjà pu être jugé que la mention du report des congés payés acquis au titre de la période antérieure à la période de référence en cours sur le bulletin de paie peut servir à établir l’accord de l’employeur à ce report (cass. soc. 9 juillet 2015, n° 14-10051).

 

L’employeur peut-il alors invoquer une erreur pour s’exonérer de son obligation de payer les congés mentionnés comme reportés ?

Dans une affaire jugée par la Cour de cassation le 9 décembre 2020 (n° 19-12739), une salariée avait saisi les prud'hommes pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat aux torts de l'employeur. Elle réclamait également le paiement de diverses sommes, dont un rappel à titre d'indemnité compensatrice de congés payés.

La salariée produisait à l’appui de sa demande son bulletin de paie du mois de mai 2014, duquel il ressortait qu'elle avait accumulé 115 jours de congés payés non pris (soit une somme de 12 314,89 €).

 

La Cour d’appel invoque l’erreur de l’employeur

Les juges d'appel n'avaient pas donné gain de cause à la salariée. Ils ont considéré que la mention sur le bulletin de paie résultait d’une erreur qui avait d’ailleurs été corrigée le mois suivant, sur le bulletin de salaire du mois de juin 2014 faisant alors apparaître un solde de 25 jours de congés payés.

 

A tort, selon la Cour de cassation

La Cour de Cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel, au motif que :

-           la mention d'un solde de congés payés de 115 jours sur le bulletin de salaire du mois de mai 2014, pouvait valoir accord de l'employeur sur le report des congés payés acquis sur des périodes antérieures à la période de référence en cours (rappel de sa jurisprudence antérieure) ;

-           l’employeur n’a pas justifié avoir permis à la salariée d’exercer effectivement son droit à congés payés ;

-           l’employeur n’a pas apporté la preuve démontrant que la mention d'un solde de 115 jours de congés payés acquis procédait d'une erreur de sa part.

Il semble que la cour de cassation entend donner une force probante à la mention du solde de congés payés sur le bulletin de paie. L’employeur ne pourra alors plus se contenter d’invoquer une erreur, il devra apporter des éléments prouvant que le report des congés procède d’une erreur, en démontrant par exemple que les congés payés ont été posés antérieurement, ou qu’il a bien laissé la possibilité au salarié de les poser en temps voulu.

Dès lors, il ne peut être que conseillé aux employeurs qui ne souhaitent pas reporter les congés payés de leurs salariés d’une période sur la suivante, d’une part de s’assurer que les salariés ont été effectivement mis en mesure d’exercer leur droit à congés payés, et d’autre part, de ne pas reporter le solde sur le bulletin de paie.

 

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